A ) La mesure du temps

Si la succession des événements échappe à l'homme, celle des saisons, des mois et des années peuvent être calculées et repérées, comme en témoignent les astres et les horloges, qui nous offrent une mesure artificielle du temps.
Cette mesure mécanique évoluera de façon spectaculaire, jusqu'à la création d'un outil capable de mesurer l'écoulement du temps avec une précision incroyable. 
 
 

1)     Les horloges et les échelles de temps

 

Depuis l'antiquité, l'homme a cherché à se donner un repère pour mesurer le temps. Au début, l'homme se fiait à l'alternance des saisons et aux mouvements des astres. Des instruments de mesures ont donc été créés pour "mesurer" ce temps (ex : le cadran solaire ou l'astrolabe). Les cultures se sont succédées et se sont toutes plus ou moins reportées aux saisons ou aux astres pour mesurer le temps. Le soleil était donc la référence absolue de mesure du temps. On parlait alors de "temps solaire". Celui-ci était utilisé par des instruments tel que le cadran solaire ou encore le gnomon. Il fut largement utilisé dans l’antiquité et également pendant longtemps pour la navigation. Cette échelle de temps fut longtemps dominante car l’idée de se repérer grâce à la rotation de la Terre, a mis du temps à se mettre en place. Seulement, on s'est vite rendu compte que ce système de référence n'était pas fiable et était irrégulier en plus d’être très compliqué. Cependant, la clepsydre existait déjà vers 1600 av J-C en Egypte, elle offrait un écoulement relativement régulier du temps mais n'était pas pratique pour la vie quotidienne.

On s'est donc mis à mesurer le temps grâce à la rotation de la planète Terre. On parlait alors de "temps sidéral" puisque la Terre était devenue le système de mesure du temps. Seulement encore une fois, la rotation de la Terre n'offre pas un écoulement du temps totalement régulier : il fallait sans cesse régler et rattraper le retard pris sur le temps pour avoir une mesure parfaite du temps. Au Moyen-âge, les cloches, rythment la vie quotidienne mais ne mesurent pas précisément le temps. Aussi, l'horloge du feu est utilisée dès le Moyen Âge : les bougies et les baguettes d'encens qui brûlent à des vitesses relativement prévisibles, sont utilisées pour estimer le temps qui passe, puis laissent la place aux lampes à huile en usage aux XVIIIème et XIXème siècles en Occident. En parallèle, on continuait à mesurer la position des astres à l'aide de l’astrolabe en navigation, permettant de calculer le temps.

                         Le sablier :                                                                                                Le gnomon :

                                                                                                         

L’invention du sablier permit en quelque sorte une première mesure uniforme du temps plus ou moins précise. Le sablier fut malgré tout utilisé du VIIIème siècle jusqu’au XIVème siècle. Au même siècle, les premières horloges mécaniques donnèrent un nouvel aspect de la mesure du temps :

Apparurent avec la mathématisation du temps, les horloges artificielles et mécaniques : considérées comme des "garde-temps" (puisqu'elles s'écoulent de façon totalement régulière), elles ne devinrent le principal l'instrument de mesure de temps qu'un siècle après Galilée car au début l'horloge (ou les montres) n'étaient pas régulières et il fallait les régler tous les jours pour avoir les vraies mesures. 

                                                                          Exemple d'un garde-temps : la montre

                                                                             

 

Celles-ci s’appuient sur l’unité de mesure définie par Galilée puis par Newton : la seconde. Ainsi, pour la première fois, l’idée apparut de calculer le temps et de créer des instruments capables de mesurer son écoulement. Cependant, il fallut beaucoup de temps aux physiciens pour établir les équations du temps et les horloges étaient loin d’être celles que nous connaissons aujourd’hui. Le temps sidéral et le temps solaire restaient donc dominants dans la mesure du temps. Seulement, innovation après innovation (montres à quartz, horloges à eau, clepsydre) et au fil des améliorations (le pendule (1657), le balancier (1675), le ressort à spirales (1675), le quartz (1967)), les horloges devinrent de plus en plus régulières jusqu’aux horloges atomiques qui donnent des précisions stupéfiantes.

                                  Horloge à quartz :                                                                               L'horloge mécanique :

                                                                                

Les "garde-temps" permettent l'écoulement du temps quelles que soient les conditions, contrairement au temps solaire où on ne peut effectuer les mesures que par temps clair. Petit à petit donc les horloges devinrent les meilleurs instruments et rabaissèrent le temps solaire au « temps solaire moyen » car sa précision fut surpassée par les horloges mécaniques.

Les horloges ont permis une mesure artificielle du temps et a remis en cause la marche uniforme des astres. On peut observer aussi que l'apparition des horloges a énormément facilité la cohésion de la planète notamment dans le domaine du transport (chemins de fer). 

L’estimation scientifique des longues durées : Depuis une siècle, la physique fournit des méthodes de datation qui sont fondées sur les propriétés physiques du corps avec la radioactivité naturelle découverte en 1896. Pour estimer les grandes durées, on se réfère aux noyaux des éléments chimiques : la période de l’uranium est de 4.5 milliards d’années (une période c’est le temps nécessaire pour décomposer un quart d’élément chimique), pour dater des éléments, des objets on se réfère à leur période. On a donc appris que les durées sont effroyablement élevées. On peut aussi dater les étapes de l’histoire (la Terre a 4.6 milliards d’années, la vie 3.6 milliards, les premiers animaux 700 millions …).

 

 

Au XIXème siècle, l'idée d'une horloge universelle et d’une échelle de temps universelle prit forme sous le nom de Temps Universel (TU). Les échelles de temps sont des systèmes de classement des événements qui permet de les dater (la plus ancienne que nous connaissons étant le calendrier).  C'est en 1884 qu'une convention internationale divisa la surface de la Terre en 24 fuseaux horaires donc l'origine se tient au méridien de Greenwich. Le GMT est né.

                                                                   Le temps universel dans le monde :

                                                          

Le 31 décembre 1899 à minuit à Londres, l'horloge universelle est appliquée. Plus de 100 ans plus tard, cette échelle de temps nous est toujours aussi utile. 

Cette mesure de temps est fondée sur la rotation de la Terre. L'heure dépend du lieu sur lequel on se trouve sur Terre. Mais elle a toujours pour référence le méridien de Greenwich (GMT, Greenwich Mean Time). Ex : Paris GMT+1. L'heure est augmentée ou diminuée selon les fuseaux. La mesure du temps profita aussi en Occident au commerce et donc à l’économie mondiale. D’où la réplique de Benjamin Franklin « souviens-toi que le temps, c’est de l’argent » et qui sembla devenir la règle d’or de l’âge industriel. Avant, il était impossible de mettre en place le temps universel car les religions, interdisaient que l’homme soit maître de son destin.

A partir du temps universel, d'autres types de temps sont apparus comme le temps universel coordonné (TUC) : c'est une mesure du temps qui prend en compte deux types de mesures : le temps atomique international (TAI) et le temps universel (TU). En 1984, « Le temps atomique international »(TAI) a définitivement remplacé le temps universel.  Cependant celui-ci reste toujours utilisé. « Le temps universel coordonné »(TUC) et le temps universel étant trop différents, on a donc trouvé un compromis entre le TUC et le TU1 « temps universel corrigé des variations du pôle » qui s’exprime comme cela :

/ TU1 – TUC / = < 0.9 secondes

Le temps des éphémérides (TE) fut instauré seulement de 1960 à 1967, en pleine transition du temps astronomique au temps atomique. Cette échelle instaurait une année tropique (celle de 1900) contenant par définition 31 556 925,9747 secondes. Si l’année 1900 a été choisie, c’est parce qu’elle marque la première année d’entrée en vigueur du temps universel afin d’en corriger les écarts. Cette échelle de temps (TU) était liée à l'uniformité de la rotation sidérale de la Terre en environ 86 164 s (TU). Mais dès les années 1930, on remarqua que la rotation de la Terre ralentit au fur et à mesure que la Lune s'éloigne de la Terre d’environ 4 cm par an : il y a transfert de moment cinétique via la dissipation des marées. Le Bureau International des Poids et Mesures (BIPM) décida donc de d'abandonner le (TU) en 1960 pour le (TE). Seulement, cette échelle de temps apparu au même moment que le temps atomique. Rapidement, cette échelle de temps s’est montrée beaucoup plus précise, efficace et stable. Le temps des éphémérides disparut donc en 1967 au profit du temps atomique. Cette date marque d’ailleurs la fin du temps astronomique, basé autrefois et jusqu'aux années 1950-1960 sur les mouvements des astres.

Le temps atomique, apparu dans les années 1970, est devenu l'unité de temps la plus précise que l'homme n'ait jamais connue, notamment avec la définition de la seconde qui a offert non seulement une définition au temps mais aussi une unité qui désormais permet de mesurer les durées. Ce temps a marqué une révolution, qui marque aujourd’hui le triomphe de la théorie de la relativité énoncée par Einstein un demi-siècle plus tôt.

 

Le temps Universel a donc permis un développement accéléré et a facilité les échanges dans le monde. Les horloges et les échelles de temps ont permis à l’homme dans un premier temps de faciliter leur repère dans la vie quotidienne avec le temps solaire. Avec Newton et la mathématisation du temps, les « garde-temps » sont apparus progressivement comme les meilleurs instruments de mesures du temps. Avec l’apparition des horloges mécaniques, les échelles de temps se sont développées et servent désormais à effectuer des mesures, autant utiles pour la vie quotidienne que pour les mesures physiques. Aujourd'hui encore par le temps atomique, nous retrouvons les principes du temps universel.

 

2)    Le temps atomique international

Le temps atomique international s’est mis en place dans les années 60 et a succédé au temps astronomique. Cette échelle de temps est aujourd’hui la plus précise au monde. Elle est basée sur la seconde (son unité est la seconde). Celle-ci a été définie en 1967 lors de la 13ème conférence générale des poids et mesures comme étant la durée de 9 192 631 770 période de la radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'isotope 133 stable de l'atome de césium. La précision de la définition de la seconde est supérieure à 10-13. Ce sont donc des atomes et des photons qui mesurent le monde. La seconde atomique mondiale est établie par une moyenne de plus de 300 horloges atomiques à jet de césium. L’unité astronomique est aujourd’hui exprimée en unités atomiques. Aujourd’hui, ce sont les horloges moléculaires et atomiques qui sont les plus fiables, s’appuient sur les absorptions ou les émissions des ondes électromagnétiques notées delta E = hv

                          L'isotope 133 de l'atome de Césium :                                         Les états de l'atome de Césium :

                                                                 

Cette échelle de temps est aujourd’hui partout et mesure aussi bien les éléments les plus éloignées de notre système-solaire, notamment le système Soleil-Terre-Lune qui offre une des mesures astronomique les plus précises, que les phénomènes de la vie courante. Le temps atomique est présent partout dans notre vie. Il rythme notre vie au quotidien avec son effet présent sur toutes les horloges, les montres et les ordinateurs et même le GPS.

Le temps atomique international est très ancré dans notre vie sociale : il suffit de constater le nombre d’individus possédants des montrent ou se référant aux horloges pour prouver que le temps atomique est le temps de la vie quotidienne.

 

Cependant, bien qu’il soit indispensable pour les gens aujourd’hui, il est encore plus utile pour la physique et les mesures de précision.

Le temps atomique résulte de la relativité générale mais il est surtout le résultat d'une profonde révolution conceptuelle, qui réunit les arguments des grands physiciens de Newton à nos jours. Le temps atomique est intimement lié à la relativité puisque la 17e conférence générale des poids et mesures (1983) a décidé que le mètre est la longueur du trajet parcouru par la lumière pendant une durée de 1/299 792 458secondes. La vitesse de la lumière est devenue un facteur de conversion qui permet de transformer les secondes en mètres (notamment utilisé par le GPS). La théorie de relativité d'Einstein est finalement devenue la théorie du temps atomique universel.

Cette échelle de temps réunit plusieurs définitions du temps qui ont traversées les siècles comme :

·         Le temps absolu, vrai et mathématique, sans relation à rien d'extérieur, coule uniformément et s'appelle durée.

·          Le temps relatif, apparent et vulgaire est cette mesure sensible d'une partie de durée quelconque prise du mouvement dont on se sert ordinairement à la place du temps vrai.

C’est pour cette raison que les horloges idéales mesurent le temps propre le long de la trajectoire. Les horloges atomiques semblent remplir cette fonction, en mesurant avec une quasi exactitude l'écoulement du temps :

                                                                            L'horloge atomique internationale :

                                                      

Les atomes de césium (en bleu) sortent d'un réservoir à température ambiante, à plusieurs centaines de mètres par seconde. Six lasers (en rouge), les refroidissent à une vitesse de quelques millimètres par seconde et une température d'un millionième de degré au-dessus du zéro absolu (-273°C). Le nuage d'atomes se propage dans le tube. Une source micro-onde, comportant un oscillateur à quartz, émet un signal radio réglé de fréquence de vibrations des atomes. Au bout du tube, des lasers mesurent la fréquence des oscillations. Le résultat est injecté dans la source micro-onde afin de corriger le signal radio pour les bouffées d'atomes suivantes (flèches vertes). Le processus est répété en continu pour maintenir le signal radio au plus près de la fréquence d'oscillations. Plus les atomes sont froids et lents, plus celle-ci est proche de la fréquence des atomes et moins la seconde varie.

Aujourd'hui le temps atomique international mesure le monde, mais aussi l'espace. En 1961, les premières mesures radar de la distance entre la Terre et une planète ont été réussies. Au cours des années, ces mesures se sont améliorées. La précision atteinte grâce aux horloges atomiques est telle qu'elle a donné les mesures de l'unité astronomique :

  • 1 UA (unité astronomique) = 149 597 870 691 mètres
  • c (célérité) = 299 792 458 mètres par secondes
  • 1 UA/c = 499.004 783 806 secondes

Il faut donc un peu plus de 8 minutes pour que la lumière effectue la distance Soleil-Terre. En astronomie, la distance moyenne de la Terre au Soleil est choisie comme unité de longueur. La définition de la seconde fait référence aux concepts de la relativité générale, c'est un temps propre. La seconde est devenue l'unité du système international de temps SI.

On sait ainsi que la relativité générale décrit avec une extrême précision la dynamique su système Soleil-Terre-Lune ce système, est d’ailleurs au cœur de la relativité générale.

 

Aujourd’hui, le temps atomique permet de vérifier une définition d’Einstein à propos du temps relativiste : « Si nous voulons décrire le mouvement d'un point matériel, nous donnons les valeurs de ses coordonnées en fonction du temps. Mais il ne faut pas perdre de vue qu'une description mathématique de ce type n'a de sens physique que si l'on a au préalable précisé la façon claire qu'il faut entendre par "temps". Il nous faut garder à l'esprit que tous les jugements dans lesquels le temps joue un rôle sont toujours des jugements sur des événements simultanés. Par exemple lorsqu'on dit "tel train arrive à 7 heures" cela signifie à peu près "le passage de ma petite aiguille sur ma montre sur le 7 et l'arrivée du train sont des événements simultanés. »

Le "temps" d'un événement est donc l'indication, simultanée à cet événement, d'une horloge au repos, située à l'endroit de l'événement.

Le processus mis en jeu dans l'horloge, et plus généralement dans tous processus physique, se déroule d'autant plus vite que le potentiel de gravitation du lieu où il advient est plus grand.

Or il existe des "horloges" qui sont présentes en des lieux de potentiels gravitationnels différents et dont l'allure peut être suivis très précisément : ce sont les sources de raies spectrales. Cependant, la précision des horloges continue de s’améliorer à une vitesse assez étonnante. Les meilleures horloges à atomes froids sont déjà présentes aujourd'hui et leurs performances sont améliorées dans l'espace grâce à l'environnement de microgravité. La stabilité et l'exactitude est espérée à 10-16 en relatif sur quelques jours. 

La gravité serait donc une propriété comme le montre l'effet "redshift" ou "décalé vers le rouge", qui montrerai que le temps se dilate et n'est pas partout le même. S’il n'y a pas de mouvement, ni de champs de gravité et s'ils sont munis d'horloges identiques, les deux observateurs constatent par transfert d'impulsions électromagnétiques que leurs horloges restent synchronisées (elles indiquent le même temps et avancent avec la même fréquence). S'il n'y a pas d'effet Redshift, les deux observateurs observent que leurs horloges avancent avec des fréquences différentes.

Le temps atomique international est devenu de loin l’échelle de temps la plus précise au monde. En s’inspirant des principes de la relativité, l’homme a réussi à combiner la relativité dans une horloge, capable de mesurer le temps, tout en étant inséré dans la vie quotidienne.

 

 

Le XXème siècle est donc marqué par d'importantes innovations comme le temps atomique international. Ce n'est pas un hasard comme le souligne Serge Reynaud puisqu'en ce debut de siècle, Einstein ou encore Lorentz en sont venu à bousculer le monde de la physique par une nouvelle vision de l'espace et du temps illustrée par la relativité.

 

====>  Relativité et espace